La Commission européenne doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour faire cesser l’agression militaire turque dans le nord-est de la Syrie

10 Février 2025

Lettre ouverte du Mouvement Européen pour l’Eau à Mme Ursula Von Der Leyen, présidente de la Commission Européenne, à Mme Jessika Roswall, commissaire européenne pour l'environnement et la résilience de l'eau, à Mme Dubravka Šuica, commissaire européenne pour la Méditerranée

Le Mouvement Européen pour l’Eau (EWM) et ses membres ainsi que le mouvement européen de l'écologie pour le Kurdistan (Tev-Eko) demandent instamment à la Commission européenne de sortir de son silence coupable face au drame humanitaire et écologique qui se déroule actuellement dans le nord-est de la Syrie du fait de l’agression militaire turque ciblant la population civile majoritairement kurde et le barrage de Tişrin sur l'Euphrate.

La Turquie utilise l’eau comme arme contre les kurdes turcs, syriens et irakiens depuis des années

Au delà de l’usage de l’eau comme arme contre les kurdes et ses alliés en Syrie, la Turquie pratique aussi une guerre de l’eau non déclarée dans les bassins hydrographiques transfrontaliers (Euphrates, Tigre) pour imposer son hégémonie politique aux pays concernés, Syrie et Iraq.

Les écologistes de Tev-Eko, dont beaucoup sont membres de la diaspora kurde en Europe, ont documenté ces pratiques de la Turquie (voir la déclaration de Tev-Eko) qui sont anciennes.

Durant les négociations pour l’adhésion de la Turquie à l’UE, le gouvernement turc de l’époque a affirmé avoir adapté sa politique de l’eau à celle de l’UE. La politique de l’eau de l’UE se décline en gestion concertée par bassin versant, solidarité amont-aval, juste partage de l’eau entre différents usages, protection des milieux aquatiques etc. La Turquie n’applique pas du tout cette politique de l’eau, bien au contraire. Aussi, l’EWM s’étonne que la Commission européenne n’ait jamais fait aucune remarque à la Turquie, même après les bombardements du barrage de Tişrin. Le barrage de Tişrin fournit de l’eau pour la production d’eau potable, l’irrigation agricole, la production d’électricité, indispensables à la vie de plusieurs centaines de milliers de personnes. Sa destruction aurait des conséquences sociales et environnementales incalculables comme l’explique Tev-Eko, obérant la vie des générations futures et des écosystèmes sur une grande zone en aval.

La politique européenne de migration est contraire aux droits de l’homme tout en étant inefficace pour éradiquer le terrorisme islamiste en Europe

Depuis 2016, l'Union européenne a payé la Turquie pour empêcher les Syriens fuyant le régime d'Hafez Al Assad de se réfugier en Europe. En retour, l'UE a fermé les yeux sur les crimes de guerre commis contre les Kurdes dans Kurdistan Turc lorsque plusieurs villes comme Cizre, Sirnak et Nusaybin ont été détruites et qu'un demi-million de personnes ont été déplacées en 2016, ainsi que sur les atrocités perpétrées par les milices islamistes de l'Armée nationale syrienne (ANS) contre les personnes incapables de fuir la région d'Afrin, principalement peuplée de Kurdes, après son passage sous le contrôle de la Turquie en 2018. Comme nous l'avons vu, cela n'a pas empêché les attaques islamistes en Europe.

La même situation, mais en pire, risque de se reproduire avec l'attaque de l'armée turque et de ses alliés du SNA contre la région de l'Administration autonome du nord-est de la Syrie. La prise de contrôle de cette région démocratiquement gouvernée par l'armée turque et l'ANS entraînera la mort de milliers de civils, le déplacement d'au moins des centaines de milliers de personnes ainsi que la libération de prisonniers de Daech (État islamique), dont la plupart ont des passeports européens.

La commission européenne doit agir en conformité avec les valeurs de l'Union Européenne

La Commission européenne, dont la présidente vient récemment de réaffirmer solennellement les valeurs portées par l’Union Européenne, se doit de les traduire dans les faits en toutes occasions. Or, ces valeurs européennes sont actuellement bafouées par la Turquie dans le nord-est de la Syrie, et cela aura aussi des conséquents dramatiques à plus ou moins brève échéance au sein même des Etats membres de l’Union Européenne. Nous exhortons donc la Commission européenne à faire tout ce qui est en son pouvoir pour faire cesser l’agression militaire turque en Syrie.

contact : hello (at) europeanwater.org