Formes juridiques de participation démocratique aux entreprises municipales

Première séance de travail du Conseil berlinois de l'eau

Le 30 janvier 2014, lors de la première séance de travail du Conseil berlinois de l'eau, de nombreux représentants de comités d'action citoyens et d'organisations se sont informés sur les différentes formes juridiques dans lesquelles il est possible d'organiser la participation démocratique aux entreprises municipales; il s'agissait de faire avancer les débats sur la forme juridique future la plus appropriée et sur la structure d'organisation des Berliner Wasserbetriebe (entreprises berlinoises de distribution de l’eau) après remunicipalisation.

Au cours des quatorze années qui ont suivi la privatisation de 1989 - les Berliner Wasserbetriebe avaient été cédées à 49,9% aux groupes Veolia et RWE -, l'activité des Berliner Wasserbetriebe a été soumise à une maximisation des profits. Alors que le Land restait actionnaire majoritaire des Berliner Wasserbetriebe, la direction technique et commerciale était complètement aux mains du privé. Les conditions de ce « partenariat public-privé » (ppp), qui incluaient une garantie de profits pour les groupes privés, étaient secrètes; c'est sous la pression du référendum exigé par la « Berliner Wassertisch » que le Sénat finit par les rendres publiques. A l'automne 2012, le Land de Berlin rachetait la participation du groupe RWE; le rachat de celle de Veolia intervint en décembre.

Maintenant que les Berliner Wasserbetriebe sont revenues dans le giron du Land de Berlin, la Berliner Wassertisch exige une restructuration des Berliner Wasserbetriebe — dont l'organisation, comme aux temps du privé, est toujours celle d'une holding — de façon à garantir la participation la plus large possible de la population. Les expériences accumulées du temps de la privatisation induisent la nécessité d'une entente sur la pratique de la participation citoyenne en Allemagne et à l'étranger ainsi que sur les possibilités et limites du législatif berlinois vis-à-vis des entreprises municipales. Les avantages et inconvénients des formes juridiques de l'entreprise en nom personnel, de l'établissement de droit public et de la sarl à but non lucratif sont à examiner au regard des possibilités de transparence et d'influence de la démocratie directe. Les rapports introductifs des Dr. Carsten Herzberg (Université de Potsdam), Michael Efler („Mehr Demokratie“ e.V.) et Gerhard Seyfarth (Berliner Wassertisch) ont fourni des données décisives pour un positionnement fondé.

Faire face aux lobbyistes

Le débat qui en a découlé est arrivé à un consensus sur le fait que la direction des Berliner Wasserbetriebe, qui vont devenir municipales et passer en propriété publique, doit impliquer directement la population et qu'elle ne saurait être soumise à la maximisation des profits. Il s'est également dégagé un consensus sur le fait que la forme juridique ne pourra être retenue qu'à la fin du processus de prise de décision et qu'il faudra d'abord expliquer clairement dans quelle mesure les citoyen(ne)s pourront et devront élargir leur influence sur les Berliner Wasserbetriebe. Une participation sous forme de démocratie directe paraît incontournable, l'expérience de la privatisation partielle à Berlin ayant prouvé que le contrôle par le seul Parlement ne suffit pas, que la démocratie représentative n'est plus en mesure d'enrayer l'érosion d'un bien public sapé par une économie débridée ou de s'opposer à une influence massive des lobbyistes.

Pour la Charte berlinoise de l'eau, qui contient des objectifs pour une gestion de l'eau transparente, socialement juste, écologique, soutenable et démocratique, beaucoup de modifications ont été proposées, qui sont passées en revue mi-février au sein du groupe de travail remunicipalisation. La deuxième séance de travail, le 27 février, visera à mettre au clair les questions techniques qui permettront de demander un état des lieux sur l'infrastructure des Berliner Wasserbetriebe et les investissements nécessaires qui en découleront.

Un modèle pour d'autres remunicipalisations

La remunicipalisation des Berliner Wasserbetriebe et la création du Berliner Wasserrat (Conseil berlinois de l’eau) ont retenu l'attention du monde entier et sont suivies avec un grand intérêt. Un mouvement global de remunicipalisation a les yeux tournés vers la capitale allemande, car cette remunicipalisation des Berliner Wasserbetriebe représente une chance unique, un projet-modèle de participation directe à une entreprise publique, qui peut constituer un précédent sur la voie de la reconstruction du primat de la politique et un modèle pour la remunicipalisation d'autres services publics.

Le texte est une traduction en français d’un article de Ulrike von Wiesenau dans le Neue Rheinische Zeitung

Ulrike von Wiesenau est porte-parole du « Wassertisch » et a été associée dans une large mesure au projet de campagne pour le référendum berlinois sur l’eau, qui a été un franc succès. L’experte en démocratie conseille des organisations et des comités d’action citoyens du mouvement pour la démocratie directe par son travail de relations publiques et ses actions politiques.


Berliner Wasserrat