L’Union Européenne est actuellement engagée dans la rédaction de règlements et la révision de plusieurs directives dans le domaine de l’eau. Ce processus législatif va orienter pour les 30 ans à venir non seulement la politique de l’eau en Europe mais aussi celle de l’agriculture, de l’environnement et du climat. Or, le législateur est confronté à un défi inattendu et dont il a du mal aujourd’hui à évaluer l’ampleur : les micro-polluants émergents, et particulièrement les microplastiques.
D’OÙ VIENNENT-ILS ?
Les microplastiques ont une origine soit primaire, soit secondaire. Les microplastiques primaires sont des composants de produits utilisés en agriculture, en cosmétique, en pharmacie, en construction, en peinture, en agroalimentaire… Les microplastiques secondaires sont le résultat de la dégradation de déchets plastiques, d’emballages, de pneus, de vêtements… Cette dégradation mécanique, physico-chimique et même biologique libère non seulement des microplastiques mais aussi du carbone organique dissous (COD). Une étude de l’Institut méditerranéen d’océanographie et de l’Ifremer montre que les additifs plastiques comme les phtalates constituent une fraction importante de la pollution par le COD.
Plusieurs études récentes ont montré que les microplastiques étaient présents dans les eaux superficielles et souterraines utilisées pour la production d’eau potable, les eaux usées traitées et les boues résiduelles à la sortie des stations d’épuration, les eaux littorales et le fond des océans, mais aussi dans l’eau du robinet et l’eau en bouteille. Les microplastiques sont ingérés par de nombreux organismes vivants et se retrouvent dans l’ensemble de la chaîne alimentaire. Il faudra bien en tenir compte dans la révision des directives eau potable, traitement des eaux usées urbaines, dans le futur règlement sur les exigences minimales pour la réutilisation de l'eau, pour ne citer que ceux-là.
L’Union Européenne a du pain sur la planche. Elle doit convaincre les Etats membres d’adopter rapidement une définition unique et cohérente des microplastiques. Il faut également mettre au point des techniques fiables et bon marché pour détecter la présence de microplastiques et pour les éliminer pendant la potabilisation et l’épuration. A partir de là, les scientifiques devraient pouvoir déterminer la toxicité et la rémanence des microplastiques dans l’environnement beaucoup plus précisément qu’actuellement, et enfin le législateur devrait pouvoir adopter les mesures qui s’imposent. Nous en sommes encore loin.
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